Mendi Ederrak

De Cauterets au toit des pyrénées françaises, le trail du Vignemale!

10 Juillet 2014, 21:01pm

Publié par Peio (qq modifs du Pierrot)

Le trail est, à la base, une discipline de la course à pied... Discipline extrêmement variée, les épreuves allant d'une dizaine de kilomètres à plusieurs centaines de kilomètres. Le dénivelé aussi diffère, de quelques hectomètres à 24 000 D+ pour le Thor des Géants. Enfin, le terrain et l'environnement varient aussi: trail de plaine, trail de moyenne montagne, trail de haute montagne, ou même des trails urbains!

Vous l'aurez compris, il y en a pour tous les goûts! Le Trail du Vignemale occupe une place bien spéciale, voire assez extrême dans ce monde. C'est une course exceptionnelle!

Exceptionnelle par son profil, le départ est donné à 935 pour monter progressivement jusqu'au sommet du Vignemale, le toit des Pyrénées françaises qui culmine à 3 298 mètres! Ce profil a engendré un écart de température significatif (de 0 degré au sommet, à 24 degrés à Cauterets) pour cette édition 2014. Des terrains très divers, après le refuge de Baysselance, c'est plus de 700 mètres de dénivelé qu'il faut grimper sur le glacier d'Oussoue, avant d'attaquer la partie sommitale de Piquelongue qui s'apparente presque à de l'escalade. La nature des terrains participe aussi à rendre la technicité de ce trail exceptionnelle. Cette course favorise les montagnards, les amoureux de l'alpinisme, du pyrénéisme. S'enfiler 2700 D+ en un coup s'est avéré être un effort bien particulier, qui nécessite une bonne gestion et un pas économe, un pas rodé, comme la foulée du marathonien, ou le coup de pédale du cyclo. Mais attention, le sommet des Pyrénées françaises se mérite, et les barrières horaires du refuge de Baysselance et de l'avant partie sommitale sont de véritables couperets! Un gros tiers des coureurs partis à l'assault du Vignemale n'ont pas eu le droit de monter au sommet, et sont rentrés frustrés à Cauterets. Mais, cela a aussi permis d'éviter de donner trop de sueurs froides aux organisateurs).

Quelle autre course offre la possibilité de monter les derniers mètres d’un sommet en tirant sur des cordes, de glisser sur un névé pendant 600m de D- en 10minutes ?

Exceptionnelle par son histoire, sa première édition remonte à... 1904, on ne parlait pas encore de trail à cette époque, mais Jean-Marie Bordenave remporta la course en 6h01(en 5h22 en 1906)! Les Slab n'existant pas, c'est pieds nus que certains concurrents prenaient le départ... Puis 80 années de diette, quatre éditions entre 1987 et 1991... Où l'on commençait à parler de course en montagne. Activité alors pratiquée par des montagnards, des locaux, et non des anciens triathlètes, coureurs ou autres, comme aujourd'hui... Le niveau était extrêmement relevé puisque le 80ème en 1991 bouclait l'aller retour aussi vite que le 25 eme de cette édition 2014! Le public aujourd'hui a donc bien évolué, beaucoup de néophytes, de traileurs de moyenne montagne comme moi, qui n'ont pas forcément la même efficience en montée sur un tel parcours, ou la technicité nécessaire. Sur ce trail, le rendement de vos pas, votre aisance sur des terrains minéraux, prennent le dessus sur les capacités physiques habituellement nécessaires.

Enfin, et surtout, exceptionnelle par ses paysages qui resteront gravés dans ma mémoire. La montée de la vallée de Gaube est somptueuse, la descente par la vallée du vallée du Lutour l'est tout autant. Les points de vue sur le lac de Gaube et le lac d'Estom sont idylliques, d'une rare pureté. Nous avons senti la montagne vivre au bruit des torrents et cascades, nous avons été saisi par la force de cette nature. Avec ce parcours, le pyrénéisme, avec son approche très esthétique de la montagne prend tout son sens. Quelles sont belles nos Pyrénées avec ces montagnes aux cimes tranchantes et découpées, ces petits lacs aux couleurs turquoises, son caractère sauvage!

Lac de Gaube - photo Niko Darmaillacq

Lac de Gaube - photo Niko Darmaillacq

Lac d'Estom - photo Niko Darmaillacq

Lac d'Estom - photo Niko Darmaillacq

Remonter ce glacier de l'Oussoue, le deuxième plus grand des Pyrénées derrière l'Aneto, restera aussi un grand moment. La rencontre avec des skieurs d'alpi dévaleant le glacier, des pyrénéistes cramponnés m'a rappelé que nous étions bien dans cet univers magique de la haute montagne. Le descendre sur les fesses à toute vitesse fut aussi orgasmique! Dommage que le roi des Pyrénées françaises ne se soit pas déshabillé, qu'il n'ait pas voulu nous offrir sa vue sur tous les pics aux alentours, son panorama exceptionnel. Mais, c'est cela aussi la montagne!

Un petit bémol, la tension sur cette ascension finale qui n'est, je pense, avec du recul, pas bien dangereuse. Monter encordés, en entendant, "attention cailloux! cailloux!" toutes les 30 secondes, n'a pas été un moment très agréable. Cela m'a rappelé ces sentiments de stress les quelques fois ou j'ai repris le ski alpin. Pour moi la montagne rythme avec calme, j'aime m'y adonner à la contemplation, et bien souvent c'est un moment privilégié pour me retrouver.

L’organisation permet l’accès aux traileurs à un sommet réservé normalement aux alpinistes. La sécurité est maximisée avec la mise en place de cordes statiques et le prêt de longes pour l’accès au sommet ou sur les névés pentus. L’absence de ravitaillement (sauf eau) rappelle aussi qu’on n’est pas ici au marathon de paris. On peut s’étonner en revanche de l’absence de matériel obligatoire type membrane & gants. Malgré cette organisation tendant à « aseptiser » la montagne, il faut en appeler à la responsabilité des traileurs qui s’inscrivent. Il ne s’agit pas d’un trail classique et une certaine auto-censure est nécessaire pour ceux qui ne sont pas du tout à l’aise dans les passages techniques où il faut poser les mains.

Malgré cette organisation tendant à « aseptiser » la montagne, il faut en appeler à la responsabilité des traileurs qui s’inscrivent. Il ne s’agit pas d’un trail classique et une certaine auto-censure est nécessaire pour ceux qui ne sont pas du tout à l’aise dans les passages techniques où il faut poser les mains.

Des rumeurs circulent comme quoi cette course ne sera poursuivie dans le futur. Il serait dommage de l’arrêter car elle offre l’accès au toit des Pyrénées à des non–spécialistes d’alpinisme. Et je trouve que ce n’est pas plus (voire moins) dangereux que n’importe quel ultra de montagne, où les coureurs se retrouvent isolés de nuit, certes moins haut...

Cette course du Vignemale m'a donné envie de découvrir en profondeur ces Pyrénées avec mon pote Jeff, véritable passionné, de gravir d'autres pics mythiques mais pas forcément dans le cadre d'un trail, même si l'expérience fut géniale!

Sur le glacier - Photo Niko Darmaillacq

Sur le glacier - Photo Niko Darmaillacq

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