Mendi Ederrak

Un dia a la Cabeza Del Condor !

26 Juin 2014, 20:50pm

Publié par Jeff

Il est 9 heures quand nous partons de notre hôtel du centre ville de La Paz, après une nuit bien reposante et une bonne douche chaude!

Nous partons pour environ 2h30 de 4x4 jusqu'au village Aymara de Tuni perché au milieu des montagnes à 4400m d'altitude.

Nous y prenons le déjeuner avec une magnifique vue sur le Huayana Potosi (un autre 6000 très convoité de la cordillère royale pour sa "relative" facilité d'ascension).

Un dia a la Cabeza Del Condor !

Il est 13h quand nous commençons notre marche jusqu'au camp de base. Nous avons 2 mules au lieu des 3 prévues initialement. D’un commun accord avec le guide, nous ne prendrons donc pas de tente mess ni de table et de chaise!

Après deux heures de marche environ, nous arrivons à la magnifique lagune Chiar Khota, à 4600m, où nous installons le camp. La vue est saisissante sur notre objectif du lendemain: La Cabeza Del Condor!

Désolé la mule n'aime pas la vue!
Désolé la mule n'aime pas la vue!

Désolé la mule n'aime pas la vue!

Le massif du Condoriri regroupe 13 sommets de 5100m à 5648m. Le plus haut, la Cabeza Del Condor, possède deux crêtes jumelles, Las Alas, de part et d'autre du sommet, et le pic ressemble à un condor qui prend son envol.

Selon la légende locale, le massif serait le dernier refuge du plus grand et du plus féroce condor des Andes, qui enlève des enfants pour en faire des "homme-condors" et les renvoyer ensuite semer la terreur et la mort parmi les hommes!

Le condor prend son envol !
Le condor prend son envol !

Le condor prend son envol !

Mais ce n'est pas pour cette raison que nous avons choisi ce sommet! Après avoir gravi le point culminant de la Bolivie avec le Sajama, l'idée était pour nous de viser une ascension plus technique et plus esthétique, sur un sommet également emblématique de la cordillère royale.

Notre choix s'est donc tout naturellement tourné vers la Cebeza Del Condor.

L'après midi passera lentement. Cam fera une sieste dans la tente pendant que je monterai sur un mirador environnant permettant d'avoir une belle vue sur tout le massif du condoriri.

Un dia a la Cabeza Del Condor !

S'en suit une discussion très intéressante avec notre guide Sergio qui nous expliquera le déroulement de sa formation de guide, entre l'Amérique du Sud et Chamonix.

Un parcours et une expérience impressionnants, malgré ses 33 ans. Les guides sud-américains sont décidément très ouverts et très simples, quel régal de partager ces ascensions avec eux !

Discussion autour d'un thé chaud!

Discussion autour d'un thé chaud!

Pendant ce temps, Camille prend le temps d'essayer et régler les chaussures qu'elle a louées pour le sommet. En effet, ayant eu quelques gelures aux orteils au Sajama, nous avons sorti l'artillerie lourde pour le Condoriri, afin d'être sûre qu'elle n'ait pas froid aux pieds! Légèrement trop grandes, ces chaussures seront une petite source d'inquiétude pour l'ascension du lendemain.

Nous prendrons le dîner vers 18h, moi, sur une table en pierre avec Sergio, Camille dans la tente (le soleil est couché et il fait déjà frais!).

Au menu ce soir, une délicieuse soupe suivie de pâtes avec une sauce de lama aux pêches.

Notre cook est vraiment impressionnant, il arrive à cuisiner à 4600m, des plats que l'on serait incapable de concocter chez nous!

Miam!

Miam!

C'est donc le ventre bien plein que nous nous couchons vers 19h30. Nous sommes à présent bien acclimatés et dormir à ces altitudes ne nous pose plus aucune difficulté.

Notre guide prévoit 6h d'ascension et le réveil est fixé comme pour le Sajama à 2h.

Bonne nuit Nevado Condoriri et à demain pour une longue journée riche en émotions !!

Buenas Noches Senor Condoriri !

Buenas Noches Senor Condoriri !

Au milieu de la nuit, un chuchotement nous réveille en sursaut! C'est notre guide qui nous appelle. Je pense d'abord à une panne de réveil, mais il n'est que 21h30.

En fait il a été appelé par un collègue guide afin d'aller secourir une cordée canadienne qui serait en difficulté dans une paroi rocheuse dans le massif.

Il nous prévient donc qu'il doit partir organiser les secours et qu'il fera tout pour être rentré pour 2h...

En Bolivie, les secours en montagne n'existent pas, et encore moins les héliportages. C'est donc aux personnes sur place (et en particulier aux guides expérimentés) d'organiser ces secours.

C'est avec la boule au ventre que nous reprendrons le cours de notre nuit, en croisant les doigts pour que les canadiens aillent bien…

La sonnerie de mon iphone nous réveille à 2h30 pétantes ! Sonnerie que je connais par cœur puisque c’est la même qui me réveille tous les matins pour aller travailler ! J’allume la frontale… il ne fait pas chaud… Je vois la buée sortir de ma bouche et mon sac de couchage est gelé, tout comme la toile intérieure de la tente qui scintille sous la frontale…

Arrive le moment le plus dur de la journée : sortir du duvet !! Top chrono j’ouvre le duvet et j’enfile rapidement toutes mes couches !! Ouf me voilà habillé !

Je prends le temps de sortir l’électronique que j’ai laissé dans mon duvet pour la nuit, pour ne pas fusiller les batteries, et je commence à charger mon sac.

Camille mettra de son côté un peu plus de temps à sortir du duvet ! J

3h00 notre Cook frappe à la porte de la tente pour nous apporter le petit déjeuner ! Room service ! J

Il nous explique que notre guide Sergio est bien rentré, mais à 1h… Il n’aura donc dormi que 1h30, mais confirme le départ quand même : une machine !!

Sergio nous expliquera plus tard qu’un caillou était tombé sur la cheville de la Canadienne, lui brisant la cheville. Ils l’ont redescendue tant bien que mal jusqu’à leur tente, puis l’ont ramenée à Tuni à dos de cheval, pour un rapatriement anticipé jusqu’au Canada…

Pour le petit déjeuner, notre cook nous apporte un très bon cake au citron, avec du Matté de Coca, histoire de prendre un maximum de force avant cette longue journée. Nous savons que nous mangerons très peu les prochaines heures, avec le froid et la concentration de l’ascension. Il est donc nécessaire de bien s’hydrater et de prendre du sucre. Cam quant à elle fait attention de ne pas trop boire car malheureusement, avec le baudrier il est compliqué pour une femme de se soulager en montagne… Nous ne sommes pas tous égaux ! J

Je remplis une gourde néoprène d’un litre, et un thermos de 0.5L, d’eau bouillante sucrée. Afin de limiter le poids, nous aurons donc 1.5L d’eau à 2 pour la journée… Coté solide, quelques barres de Quinoa donnés par le cook et quelques Balistos que nous avons amené de France !

Il est 3h30 quand nous partons des tentes. Le ciel est clair, sans vent, avec une belle lune qui nous éclaire, bref des conditions idéales !

Les sacs sont lourds car nous ne sommes pas partis avec nos chaussures d’alpi aux pieds (peu confortables sur sentiers roulants). Si l’on rajoute les cordes, piolets techniques, crampons, coinceurs et broches, on arrive aux alentours des 15 kilos…

L'ascension commence par 1h30 de marche facile pour contourner le lac et arriver au pied de la montée. Nous nous suivons tous sans dire un mot, encore à moitié endormis. Cette partie permet de se mettre en jambe et de s’habituer à l’obscurité environnante.

Puis nous attaquons une montée très raide sur une moraine infâme, vestige d'un ancien glacier. Les bâtons sont très utiles ici. C’est à ce moment-là que je décide de mettre mes chaussures pour alléger le sac et me réchauffer les pieds. Cam fait le choix de rester en Xa-Pro encore pour cette montée jusqu’au glacier. Cette partie se fait toujours de nuit, ce qui n’est pas plus mal car cela nous évite de voir l’interminable montée qui nous attend !

Un dia a la Cabeza Del Condor !

1h plus tard, nous sommes au sommet de la Moraine et il est temps de mettre crampions-piolets-baudriers. Nous nous équipons dans une zone très raide et exposée… Cam, en Salomon doit d’abord enfiler ses grosses, en équilibre sur un rocher. Je ne cache pas mon inquiétude quant au fait que la chute est vraiment interdite ici…

Nous attaquons par un couloir à 50° en neige et glace d’environ 100m qui nous permet d’arriver à un col et de prendre pied sur le glacier.

Une longue traversée nous attend, jusqu'au pied des difficultés de la tête du condor.

Ce glacier est relativement plat avec des inclinaisons ne dépassant pas les 35 degrés, mais il est quand même nécessaire de s'encorder en raison des impressionnantes crevasses et pont de neige que l'on doit traverser. Nous apercevons, au loins les lumières de La Paz, superbe.

Le jour se lève...
Le jour se lève...

Le jour se lève...

Puis le jour se lève, avec des couleurs passant du gris, au bleu puis au rose et à l’orange. Bref encore un lever de soleil magique en montagne, où l’on ne regrette absolument pas d’être là, malgré le froid et la fatigue !

Un dia a la Cabeza Del Condor !
Un dia a la Cabeza Del Condor !

1h15 plus tard, nous voilà au pied de la « Cabeza » ! Pause au soleil pour manger et boire un coup avant d’attaquer les difficultés ! Cam se sent faible et veut nous attendre là, certainement le contre coup de l'ascension du Sajama 3 jours avant. Mais je réussis à la convaincre de continuer! Nous n’aurons pas l’occasion de revenir de si tôt!! Je lui enfile les barres de quinoa dans la bouche et lui donne à boire du thé chaud. Nous prendrons le temps qu’il faudra mais nous irons à 3 au sommet ! AUPA MARMOTAK !

Cam reprend des forces...

Cam reprend des forces...

L'ascension finale de la Cabeza commence par un couloir incliné à 45 puis 55 degrés, qui se termine par un étroite goulotte mixte en glace et rocher à 80°. La glace est très sèche et cassante en raison de l'altitude et du froid, cela change sérieusement des Pyrénées! Il faut taper fort avec les piolets, et nous faisons partir de gros blocs de glace. Nous tirerons donc une longueur à cet endroit afin d'assurer une éventuelle chute.

Ascension technique
Ascension technique

Ascension technique

Arrivés au sommet de cette goulotte 1 heure plus tard, nous mettons pied sur l’arête finale…

Cette arête est plus que vertigineuse, et pour la première fois, je me dis que je ne serais peut-être pas allé au bout si notre ami Sergio n’avait pas été là. Nous avons l’habitude de grimper des cascades, couloirs, goulottes ou arêtes rocheuses… mais les arêtes neigeuses présentent un niveau d’exposition tout autre. Pas de réelle difficulté technique, mais le vide omniprésent est saisissant avec pas moins de 400m de vide de chaque coté... et la chute ou moindre perte d’équilibre est clairement interdite !

Sergio décide de partir en premier pour tester les conditions de neige et nous l’assurons du relais. Le sommet n’a pas été fait depuis longtemps et il n’y a donc aucune trace sur l’arrête, ce qui la rend d’autant plus effilée. Le temps de poser un corps mort sur son bâton et il nous fait monter. Nous ne sommes clairement pas à l’aise avec Camille et nous restons concentrés. Sergio lui-même nous dit de faire très attention et de prendre notre temps. Après 3 longueurs de tirées et un petit passage en mixte pour pimenter encore le tout, nous continuons corde tendu. Un pas après l’autre, le regard fixé sur l’horizon, en essayant d’ignorer le vide sous nos pieds. Nous avons l’impression que cette arête n’en finit plus et que nous n’arriverons jamais au sommet. D’autant plus que nous avons bien en tête qu’il faudra repasser par-là à la descente !!

Un final vertigineux
Un final vertigineux
Un final vertigineux
Un final vertigineux
Un final vertigineux

Un final vertigineux

Puis la pente s’adoucit petit à petit, et puis enfin, nous voilà au SOMMET !! Il est 9h15, Muchas Gracias Sergio !! Malheureusement, nous prendrons seulement quelques photos et nous nous accorderons une pause rapide car l’endroit n’est pas vraiment confortable. Et puis, nous pensons déjà à la redescente et aux difficultés qu’il va à nouveau falloir surmonter. Nous avons dû rester à peine 10 minutes au sommet, mais ces dix courtes minutes nous ont largement suffit à graver cet instant dans nos mémoires… La Cordilière Royale à nos pieds, les sommets vierges et enneigés à perte de vue. Pas un bruit, personnes dans les alentours, bref le Condoriri pour nous tous seuls.

Allez, une dernière accolade et nous attaquons donc déjà la redescente.

Cam et Jeff au sommet
Cam et Jeff au sommet

Cam et Jeff au sommet

Nous réalisons que nous nous sommes légèrement (je dis bien légèrement) habitués au vide, et la descende sera plus rapide et moins cauchemardesque que prévue. Les marches que nous avons creusées à la montée facilitant également la progression. Mais nous restons concentrés car un crampon peut facilement se prendre dans le pantalon et nous faire perdre l'équilibre!

Nous retrouvons les estacas (ancres à neiges) laissées à la montée et arrivons au relais au sommet de la goulotte. Un dernier rappel et nous voilà sur le glacier, presque sortis d’affaire ! ouf ! il est temps de souffler enfin, et de faire un pause bien méritée. Il est presque 10h30, et le soleil, déjà bien haut dans le ciel, nous apporte chaleur et réconfort !

Mais il ne faut pas non plus trop s’attarder car il nous reste à présent 1200m à descendre jusqu’au camp de base, avec des sacs lourds et la fatigue accumulée… Nous prendrons donc le temps durant cette descente, en repassant aux mêmes endroits que nous avions visité ce matin même, mais de nuit.

Un dia a la Cabeza Del Condor !
Un dia a la Cabeza Del Condor !

Nous arriverons vers 13h au camp de base, épuisés mais heureux !

Et là, qu’elle fut la bonne surprise de voir que notre cook nous avait préparé de délicieuses truites saumonées pêchées le matin même dans le lac Chiar Khota ! On ne peut pas faire plus frais ! Autant dire qu’elle n’a pas eu le temps de refroidir dans l’assiette !

Nous voilà donc repus, la tête encore tout là-haut au sommet du Condoriri… prêts à partir faire une sieste dans nos tentes chauffées par le soleil !

Après l'effort, le réconfort!
Après l'effort, le réconfort!

Après l'effort, le réconfort!

Voilà une ascension qui clôture en beauté ces magnifiques vacances passées en Bolivie. Une journée vraiment pas comme les autres, au milieu de ces montagnes que nous aimons et respectons tant, et qui nous auront autorisées une fois de plus à fouler leur sommet !

GRACIAS SERGIO, GRACIAS CONDORIRI,GRACIAS PACHAMAMA, GRACIAS BOLIVIA, GRACIAS BOLIVIANOS PARA ESTA EXTRAORDINARIA AVENTURA, Y PARA ESTA FABULOSA EXPERIENCIA !!

Jeff.

Un dia a la Cabeza Del Condor !

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N
super récit pour une ascension ultra-costaude !<br /> bravo les asticots !
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